Terres d'Evangile / Vie publique /Les noces de Cana

 
 
 La fête des noces
La vie publique de Jésus commence par une noce dont il préserve la fête en faisant un miracle, le repas de Cana annonce le festin du ciel. C’est que le Christ vient renouveler l’alliance entre Dieu et les hommes, rompue par le péché, et restaurée par lui au risque de sa mort. Aux défaillances humaines il vient porter secours.
 
Accomplissement des Ecritures :
 
La fidélité de Dieu à ses alliances
Le partage du repas
L’étonnant du miracle de Cana c’est que c’est une noce et que les mariés sont complètement en dehors du miracle: ils ne savent pas que le vin manque et ils ne savent pas comment il est venu.
Pourtant en changeant l’eau en vin Jésus accomplit les Ecritures. On ne peut jamais comprendre un passage de la Bible sans le mettre en rapport avec les autres textes qui le manifestent ou l’annoncent ou l’accomplissent. Ainsi le repas de Cana ne peut-il s’approcher qu’en relevant les textes de la Genèse qui l’annoncent. De l’apparition de Dieu au chêne de Mambré (Genèse 18,1-15), la Bible a retenu l’échange des paroles entre les anges et le patriarche Abraham. La fécondité de cette conversation entre Dieu et l’homme c’est la naissance d’Isaac, le fils de la promesse, le père des croyants. Cette parole intrinsèquement liée à un repas se retrouve dans la construction du récit du mariage de Cana. Cette fois-ci c’est la Vierge Marie qui parle au Christ. De son intervention découle le miracle de Cana et la fécondité de cette parole c’est la foi des douze sur le témoignage des serviteurs. L’intervention audacieuse de Marie annonce la fidélité de sa présence au pied de la croix quand saint Jean verra naître l’Eglise du cœur transpercé du Christ. Des douze disciples enthousiasmés à Cana ne reste plus que Marie et Jean au soir du Vendredi Saint, mais cela suffit pour que l’Eglise se reconstitue au matin de Pâques. La puissance de la parole des anges à Abraham est manifestée par la naissance d’Isaac, la puissance de l’action du Christ est manifestée par la naissance de l’Eglise au pied de la croix.
A l’origine du peuple élu il y a le Chêne de Mambré, à l’origine de la communauté chrétienne il y les jarres de Cana. Autrement dit ces deux textes symétriques renvoient à des lieux précis, à des récits détaillés et en même temps il font apparaître la superposition des sens des mots alliance, parole et repas.
L’épisode du repas d’Abraham avec les trois anges à Mambré exprime une intimité incroyable entre lui et ses hôtes. Il a voulu leur offrir la meilleure bête de son troupeau, mais l’intimité entre eux dépasse ce que nous mettons sous le nom de repas. En effet Abraham est tellement nourri par leur promesse que lui et sa femme peuvent engendrer une multitude. C’est donc que ce repas est beaucoup plus que le partage chaleureux d’un même met, mais l’expression de l’unité incroyable entre Dieu et la communauté qui se crée autour de sa parole. Les descendants du patriarche définiront le créateur comme celui qui a parlé à Abraham, Isaac et Jacob. Pour les sémites la parole est une nourriture plus intime que la tendresse réciproque des époux et synonyme de l’intimité conjugale.

L’alliance nuptiale
Quand le prophète Osée est trahi par la femme qu’il a choisi, il plaide contre elle en évoquant la nourriture dont il l’a assouvie (Osée 2,10). Pourtant ce don a crée un lien si fort entre elle et lui qu’il renouvelle l’alliance nuptiale faite avec elle au point de transformer la faute en signe d’une union plus profonde. Dans les deux cas la Bible présente la fécondité de l’union entre Dieu et ceux qui l’aiment à partir de la constitution d’une famille. Plus encore quand Moïse scellera la réponse des Hébreux aux dix paroles de Dieu, le peuple ainsi constitué fêtera cet événement en mangeant avec Dieu aux pied de l’Horeb (Exode 24,11). Le premier signe que Jésus fait à Cana, associe dans un même événement le repas du mariage, l’alliance nuptiale, la constitution du groupe des douze, “dès cet instant les disciples crurent en lui”. A cause de cette triple signification le miracle de Cana annonce prophétiquement l’effusion du sang du Christ versé pour la multitude sur la croix.
Ce premier signe qui nous fait entrevoir le sens de la vie du Christ, rétablir l’alliance entre Dieu et les hommes, annonce l’“heure” où la vie du Christ sera consommée sur la croix. Quand il dit à Marie: “Mon heure n’est pas encore venue” il signifie que l’alliance qui se réalise dans son obéissance au Père ne sera manifestée totalement que sur la croix. Les mariés de Cana nous rappellent que le mariage est à son tour signe de l’amour que Dieu donne à l’homme. Le premier miracle qu’il accomplit ajoute à la joie d’un mariage et cela est très important, parce qu’à l’occasion d’une alliance humaine, il prédit l’alliance qu’il rétablit entre Dieu et l’homme. Plus tard il guérira des malades, il ressuscitera des morts, mais cette fois-ci et pour commencer son ministère, il pose un acte de jubilation, soulignant par là la bienveillance de Dieu.

Marie dans l’Evangile
Quand Jésus appelle Marie “Femme” à Cana comme au pied de la croix, quand il lui confie saint Jean comme son fils, il emploie les mêmes mots que la Genèse qui appelle Eve la mère des vivants . Par là il attire notre attention sur une réalité très mystérieuse qui est l’Eglise pour laquelle il a donné sa vie comme l’époux pour son épouse et sur le rôle de Marie qui tout en étant dans l’Eglise est en même temps mère de l’Eglise.
C’est à cause de la signification de plus en plus forte du rôle de Marie que les Pères expliquent le dialogue entre Jésus et sa mère à Cana, comme la reconnaissance de la mission de celle-ci. Toutes les fois que l’action de salut du Christ apparaît expressément dans l’Evangile, il se trouve que sa mère est présente dans le récit. Ces textes se superposent comme des prologues de plus en plus explicites jusqu’à la fin de l’Apocalypse. Cette succession d’épisodes relate l’accomplissement du protoévangile (Genèse 3,15). Cela est surprenant pour nous qui cherchons à imaginer une relation entre l’homme et Dieu. C’est pourquoi nous isolons souvent les événements où Marie apparaît comme s’ils étaient des anecdotes fortuites. Les mots employés par les écrivains sacrés sont pourtant remarquables dans la Genèse (Dieu dit au serpent: “une femme t’écrasera la tête et toi tu la mordra au talon”), l’Annonciation (l’ange dit à Marie: “Je te salue pleine de grâce…, l’Esprit Saint te couvrira de son ombre et l’enfant sera appelé fils du Très-Haut”, la Présentation de Jésus au Temple (Siméon prit l’enfant et proclama: “lumière pour les nations et gloire du peuple d’Israël” et se tournant vers Marie il ajouta: “un glaive de douleur te transpercera le cœur” (Luc 2,35), Cana (Femme qu’y a-t-il entre toi et moi, mon heure n’est pas encore venue”), la Crucifixion (Jésus dit à sa mère: “Femme voilà ton Fils” et il dit à S. Jean: “Fils voilà ta mère” Jean 19,25-27), la Pentecôte (et ce rôle de Marie à l’égard de toute l’Eglise se retrouve dans la précision du récit: “Ils persévéraient dans la prière avec Marie mère de Jésus” Actes 1,14.) et les passages concernant Marie et l’Eglise dans l’Apocalypse (“Alors apparut une femme couronnée d’étoiles, elle criait dans les douleurs de l’enfantement et elle cacha son fils au désert” Apocalypse 12,1-2). Entre la première annonce à Adam et Eve impliquant la victoire d’une femme au prix d’une grande douleur et les étapes de l’accomplissement du dessein de Dieu, nous remarquons que Marie est toujours associées physiquement au développement de étapes de la Rédemption. Il n’y a pas lieu de s’étonner que Jean voit une femme couronnée d’étoiles et criant dans les douleurs de l’enfantement lorsqu’il contemple toute l’œuvre de Dieu dans les visions de l’Apocalypse. Au fur et à mesure de la méditation des chrétiens sur cette volonté de Dieu, ils ont reconnu en Marie la mère de Jésus, la plus fidèle des croyantes, l’image de l’Eglise en sorte que les mêmes mots qui s’appliquent à elle personnellement, s’appliquent à l’Eglise et à l’humanité réconciliée avec Dieu par le Christ. S’agissant de Marie il y a toujours juxtaposition des expression qui disent la gloire, les privilèges, le bonheur et la douleur. Assumant pleinement la condition humaine et ses difficultés elle en montre l’honneur et la grandeur poussées à son paroxysme.
Ce miracle qui est le premier des signes que fait Jésus porte en lui la promesse de l’action très mystérieuse du Christ venu dans ce monde pour rendre témoignage à la vérité.

 
Le repas de Mambré
M.Diener, “Berith”


 


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  Documents associés : 
Lieu : 
Cana
Texte de l'Evangile : 
Jean 2, 1-10
Clés de Lecture : 
La fête des noces
Symboles : 
La fête
Expérience humaine : 
Les fragilités
Citations : 
Augustin (354-430), Commentaire de l’évangile de saint Jean 9
Romain le Mélode, VIe siècle
Augustin (354-430), Commentaire sur l’Evangile de saint Jean 8, 2-3