Le chemin des Cathédrales / Raison et foi /Théologie de la lumière

 
 
 Théologie de la lumière - Les trois rosaces de la cathédrale de Paris
Non seulement Dieu est lumière, mais il veut être lumineux pour ceux qui le cherchent dans leur expérience quotidienne.
 

Citations :Denys l’aréopagite
Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), la béatitude consiste-t-elle dans la vision de l’essence divine?
Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), faut-il admettre l’existence d’un intellect agent?
Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), l’intellect créé, pour voir l’essence divine, a-t-il besoin d’une lumière créée?
Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), le bien est-il la seule cause de l’amour?
Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), commentaire sur les Noms Divins
Chanoine Gauthier de Coincy, XIIIe s
Guillaume de Lorris
Saadi
Sohrawardi 12e siècle
Rûmi
Hadith


 
Denys l’aréopagite
Traité des Noms Divins 5, 6-7; 820 C - 821 C, oeuvres complètes du pseudo-Denys l’aréopagite, traduction, préface, notes et index de Maurice De Gandillac, éditions Aubier, 1943

§ 6. - Ainsi cette Bonté absolue, dont procède le don même de l’existence et dont c’est trop peu de dire qu’elle est bonté, c’est par la plus primitive de ses participations fondamentales quon la célèbre tout d’abord. C’est d’elle que procèdent, c’est en elle que résident l’existence elle-même, les principes des êtres, [820 D] tous les êtres et, en général, tout ce qui appartient au domaine de l’être, et cela de façon insaisissable, synthétique et unitaire. Tout nombre, en effet, préexiste dans l’unité sous la forme de l’un: l’unité contient en soi unitairement tous les nombres, c’est de l’unité que tout nombre reçoit son unité et c’est dans la mesure où il s’éloigne de l’unité [821 A] qu’il se divise et se multiplie. De même au centre du cercle tous les rayons coexistent dans une unique unité et un seul point contient en soi toutes les lignes droites, unitairement unifiées les unes par rapport aux autres et toutes ensemble par rapport au principe unique duquel elles procèdent toutes. Au centre même, leur unité est parfaite; si elles s’en écartent peu, elles se distinguent Peu; si elles s’en séparent davantage, elles se distinguent davantage. Bref, dans la mesure où elles sont plus proches (lu centre, par là même leur union mutuelle est plus intime; dans la mesure où elles sont plus éloignées (le lui, la différence augmente entre elles.
§ 7. - Dans la nature qui embrasse la totalité de l’univers, c’est ainsi également que les raisons de chaque nature [821 B] sont rassemblées dans une seule unité, sans confusion. Et dans l’âme aussi, de façon unitaire, les puissances providentielles correspondent à chaque partie du corps entier. Il n’est donc pas absurde de prendre appui sur ces images affaiblies pour remonter jusqu’à la Cause universelle, et de contempler avec des yeux qui ne sont pas de ce monde la totalité des choses (y compris celles qui s’opposent entre elles) dans la Cause universelle sous la forme de l’unité et de l’union. Car cette Cause est le principe des êtres; c’est d’elle que procèdent l’être même et tout ce qui existe sous quelque mode que ce soit; tout principe, toute fin, toute vie, toute immortalité, toute sagesse, tout ordre, toute harmonie, toute puissance, toute conservation, toute situation, tout partage, toute intellection, tout raisonnement, toute sensation, toute propriété acquise, tout repos, tout mouvement, toute union, tout mélange, toute amitié, toute concordance, toute distinction, toute définition [821 C] et toutes les autres modalités qui, procédant de l’être, caractérisent tous les êtres.
 


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Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), la béatitude consiste-t-elle dans la vision de l’essence divine?
Som. théol., I, II, q. 3, a.8.

L’intellect, qui connaît l’essence d’un effet sans pouvoir, par là même, connaître l’essence de sa cause, c’est-à-dire sans pouvoir atteindre cette cause en ce qu’elle est, ne saisit pas directement la cause elle-même bien qu’il puisse savoir, grâce à l’effet, que cette cause existe. C’est pourquoi qui connaît un effet et sait que cet effet a une cause, éprouve naturellement le désir de savoir ce que cette cause est en elle-même. Telle est la curiosité qui suscite la recherche, et dont il est question au début de la Métaphysique d’Aristote. Par exemple, en voyant une éclipse de soleil, on pense à sa cause, et l’on est saisi d’étonnement tant qu’on ne sait pas en quoi consiste cette cause; poussé par l’étonnement, on cherche, et la recherche ne s’arrête que lorsqu’on parvient à connaître l’essence de cette cause. Supposons un intellect humain qui, connaissant l’essence d’un effet créé, ne sait pourtant rien d’autre de Dieu si ce n’est qu’il existe. Cet intellect n’atteint pas encore directement ni parfaitement la cause première. Il subsiste donc en lui un désir naturel de chercher à connaître cette cause; il n’est pas encore parfaitement heureux. Pour obtenir le bonheur parfait, il faut qu’il parvienne à connaître l’essence même de la cause première. Alors il possédera sa perfection grâce à son union à Dieu, unique objet où réside le bonheur de l’homme, ainsi que nous l’avons déjà dit (Som. théol., I, II, q. 3, a. i (infra, p. 101)).
 


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Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), faut-il admettre l’existence d’un intellect agent?
Somme théologique. I-II, question 79, art.3

Solution 2. Il y a deux opinions sur le rôle de la lumière. Selon les uns, la vue requiert la lumière pour que les couleurs soient visibles en acte. Parallèlement, l’intellect agent est requis dans l’intellection pour accomplir la même fonction que la lumière dans l’acte de voir. Selon d’autres, il faut la lumière non pour rendre visibles les couleurs, mais pour rendre le “ milieu ” lumineux en acte. C’est l’opinion d’Averroès, dans son commentaire du traité de l’Ame. En ce sens, l’analogie aristotélicienne de l’intellect agent avec la lumière doit se comprendre ainsi: l’un est nécessaire pour l’intellection comme l’autre pour la vision, mais non avec un rôle identique.
 


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Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), l’intellect créé, pour voir l’essence divine, a-t-il besoin d’une lumière créée?
Somme Théologique, 2a, qu.12, art.5

CEPENDANT, le psaume 36,10 dit : “ Par ta lumière nous verrons la lumière. ” CONCLUSION : Tout ce qui doit s’élever au dessus de sa nature, a besoin d’y être disposé d’une disposition supérieure elle-même à cette nature, comme l’air, pour revêtir la forme du feu, doit y être disposé d’une disposition connaturelle à cette nouvelle forme. Or, quand un intellect créé voit Dieu par essence, l’essence même de Dieu devient la forme intelligible de l’intellect: il faut donc que quelque disposition surnaturelle s’y surajoute, pour qu’il s’élève à une telle sublimité. Comme donc la vertu naturelle de l’intellect créé ne suffit pas à voir l’essence divine, ainsi qu’on l’a montré (a.4), il est nécessaire que par la divine grâce, l’élu voie s’accroître et se hausser sa puissance intellectuelle. Et cet accroissement de force intellectuelle, nous l’appelons une illumination de l’intellect, comme nous appelons l’intelligible même une lumière, une clarté spirituelle. Telle est la lumière dont l’Apôtre dit: “La clarté de Dieu l’illuminera” (Ap 21,23), et ce texte vise la société des bienheureux jouissant de la vue de Dieu. Grâce à cette lumière, les bienheureux deviennent déiformes, c’est-à-dire semblables à Dieu, selon ce mot de saint Jean: “Au temps de cette manifestation, nous lui serons semblables, et nous le verrons tel qu’il est.” (1Jn 3,2)
 


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Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), le bien est-il la seule cause de l’amour?
Somme théologique I, II, q. 27, a. 1, ad 3

Le beau est identique au bien, il n’en diffère que par le concept. Le bien, qui est ce que toute chose désire., est par essence ce en quoi le désir trouve son repos; mais par essence le beau est tel que c’est dans sa perception ou sa connaissance que le désir trouve le repos. C’est pourquoi les sens les plus réceptifs au beau sont aussi les plus cognitifs, comme la vue et Poule dans leur obédience à la raison. On parle en effet de beaux spectacles et de belles musiques, mais pour les objets des autres sens, il n’est pas question de beauté, on ne dit pas de belles saveurs ou de belles odeurs. Il est donc clair que ce que le beau ajoute au bien tient à la faculté de connaître : on appelle bon ce qui plaît simplement au désir, et beau ce que l’on a plaisir à connaître.
 


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Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), commentaire sur les Noms Divins
C. 4, lect.

Chez les créatures, ce qui est beau et la Beauté sont distincts. En Dieu, ils ne font qu’un. [ ... ] La beauté de la créature n’est rien d’autre, en effet, qu’une ressemblance de la Beauté divine réfractée dans les choses. [ ... ] Dieu est la cause de l’accord entre les choses. Or il y a deux sortes d’accords dans les choses. L’un tient au rapport des créatures à Dieu; c’est celui que Denys indique lorsqu’il dit que Dieu est la cause de l’accord entre les choses en tant qu’il les appelle toutes à lui, comme à leur fin ; c’est pourquoi la beauté se dit en grec xocX6ç, mot qui vient d’un verbe signifiant appeler. Le deuxième accord est celui qui existe dans le rapport des choses entre elles, c’est celui que Denys considère lorsqu’il dit que Dieu rassemble toutes les choses dans l’unité. Cela peut s’entendre d’après la pensée des Platoniciens qui veulent que les supérieurs soient dans les inférieurs par participation ; or les inférieurs sont dans les supérieurs par l’excellence de ceux-ci, et ainsi tout est dans tout. Et du moment que toutes les choses se rencontrent les unes dans les autres suivant un certain ordre, il en résulte que toutes sont orientées vers un même dernier terme. [ ... ]
Ainsi l’existence de toutes choses dérive de la beauté divine. [ ... ] En effet toutes les choses ont été créées pour rappeler en quelque sorte la beauté divine.
 


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Chanoine Gauthier de Coincy, XIIIe s
Rose à qui neige ou gelée
Ne change point la couleur,
Dans la haute mer salée,
Vive source de douceur,
Très claire en noirceur,
Joie dans le malheur,
En flamme rosée.
Fleur de beauté recherchée,
Fleur de très rare couleur,
Château dont resta fermée
La porte, sauf au Seigneur,
Santé en langueur,
Repos en labeur,
Et paix en mêlée.
 


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Guillaume de Lorris
“ Le Roman de la Rose ” 1236

Le Temps qui s’en va nuit et jour,
Sans repos prendre, sans séjour,
Qui nous fuit d’un pas si feutré
Qu’il semble toujours arrêté
Immobile en un même point,
Et pourtant ne s’arrête point,
Mais ne cesse de se mouvoir,
Au point qu’on ne peut concevoir
Ce que c’est que le temps présent:
Demandez-le aux clercs lisant,
Car avant qu’on y eut pensé,
Il serait bien trois fois passé;
Le Temps qui ne sait séjourner,
Mais va toujours sans retourner,
Comme de l’eau qui descend toute
Sans que jamais remonte goutte ;
Le Temps, devant qui rien ne dure,
Ni fer, ni autre chose dure,
Car le Temps gâte tout et mange,
Le Temps qui toute chose change,
Qui fait tout croître et tout nourrit,
Et qui tout use et tout pourrit.
 


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Saadi
Saadi, poète persan, Le Jardin des roses, 1258

“J’allais cueillir les roses du jardin
Mais le parfum des roses m’a enivré
La création est pleine de signes
Pour celui qui possède un coeur
Il en est dépourvu celui
Qui ne reconnaît point son Seigneur.”
“Emporte une rose du jardin
Elle durera quelque jours.
Emporte une pétale de mon Jardin de Roses,
Il durera l’éternité.”
 


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Sohrawardi 12e siècle
Roloff Beny, La Perse, Pont de Turquoise, Hatier, Fribourg, 1976, p.100

L’essence de la Première Lumière Absolue, Dieu, donne naissance à une constante illumination, par laquelle elle se manifeste et amène toutes choses à l’existence, leur conférant la vie par ses rayons. Tout ce qui se trouve dans l’univers procède de la Lumière de son Essence; toute beauté et toute perfection sont le don de Sa Générosité; et atteindre pleinement cette illumination, c’est là le salut.
 


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Rûmi
Hadith sur la prière

Cette prière n’est pas une prière, Seigneur, si mon cœur ne Te voit pas face à face. Je m’oriente vers la qibla [la direction de La Mecque] par amour pour Ton visage, sinon je renoncerais à la prière et à la qibla. Mon but, en priant, c’est de me lamenter, de te confier ma peine d’être séparé de Toi. Quelle prière serait-ce si, restant auprès de Toi, dans la mosquée, mon cœur demeure dans le bazar ? Prier vraiment, c’est ressembler aux anges. Mais moi, je suis encore la proie des bêtes et des démons ! De cette prière hypocrite, j’éprouve de la honte et je n’ose lever mes regards vers Toi.
 


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Hadith
Tout acte qui rapproche Mon adorateur de Moi me sera plus agréable que l’accomplissement des devoirs que Je lui ai prescrits. Mon adorateur ne cessera de se rapprocher de Moi par des prières surérogatoires en sorte que Je l’aimerai, et quand Je l’aimerai, Je serai l’oreille avec laquelle il entendra, l’œil avec lequel il verra, la main avec laquelle il saisira, le pied avec lequel il marchera.
 


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  Documents associés : 
Lieu : 
Notre-Dame de Paris
Description de l’image : 
Les trois rosaces: la rosace nord
La Rosace ouest
La Rosace Sud
Histoire : 
L’évolution de la couleur dans l’architecture des églises
Présupposés théologiques : 
L’omniprésence du Christ à l’histoire humaine
Experience humaine : 
Les trois temps de la durée humaine: le temps cyclique, le temps irréversible et l’éternité.
Symboles : 
Les différentes perceptions de la durée