Terres d'Evangile / Passion /La crucifixion

 
 
 La Croix arbre de vie
Le vœux des hommes est d’échapper à la souffrance et à la mort et ils prêtent cet compétence aux divinités qu’ils adorent. Or le Fils de Dieu prend les épreuves des hommes de face, ne se soustrait à aucune, mais les transforme en occasions de faire confiance au Père et de pardonner aux meurtriers. Par là l’instrument de son supplice devient arbre de vie, axe d’un monde nouveau et source de bénédictions pour toute l’humanité.
 
Accomplissement des Ecritures :
 
Le serviteur souffrant
L’attente d’un Messie
Le récit de la mort du Christ est si essentiel à la foi chrétienne que les évangélistes l’ont émaillé de citations de l’Ancien Testament. Celui-ci offre à la méditation du peuple de nombreuses prophéties. Dans son histoire tourmentée Israël a été nécessairement tentée d’imaginer un secours politique et brillant qui le délivre des différents oppresseurs, Egyptiens, Assyriens, Babyloniens, Romains. Or les envoyés de Dieu l’ont régulièrement mis en garde contre cette illusion en développant l’image du Serviteur de Dieu, souffrant de toutes les douleurs du monde et cependant victorieux par la force de Dieu, de toutes les passions humaines qui créent les guerres, les exactions et la souffrance des honnêtes gens. Peu à peu les écrivains sacrés ont dessiné la figure d’un innocent parfait, fidèle serviteur de Dieu et sauvé par lui au delà des souffrances des autres hommes qu’il a porté lui-même. Ceux qu’on appelait les “pauvres du Dieu” (‘anawim’), attendaient fermement un Messie d’abord souffrant puis glorieux qui rétablirait non pas la justice vindicative des hommes, mais celle de Dieu qui est miséricordieuse. Ce thème du “Serviteur souffrant” est présent dans le livre des Psaumes, dans les textes des prophètes, en particulier Isaïe et Jérémie. C’est ce petit groupe de fidèles disciples des prophètes, “les pauvres de Dieu”, qui ont les premiers compris le message du Christ et l’ont transmis aux païens et à tous les peuples.

Le serviteur souffrant
Constatant la division des hommes, Isaïe, sept siècles avant Jésus Christ, lui oppose la douceur du Messie qui les réconciliera: “Tous, comme des brebis, nous étions errant, chacun suivant son propre chemin. Et le Seigneur a fait retomber sur Lui les crimes de nous tous. Affreusement traité, il s’humiliait, il n’ouvrait pas la bouche. Comme un agneau conduit à la boucherie, comme une brebis muette devant les tondeurs, qui n’ouvrait pas la bouche.” (Isaïe 52, 6-7). Au temps du Christ, S. Paul explique le dessin de Dieu: “qui nous a réconcilié avec lui par le Christ… C’était Dieu qui, dans le Christ, se réconciliait le monde, ne tenant plus compte des fautes des hommes, et mettant sur nos lèvres la parole de la réconciliation.” (Deuxième épître aux Corinthiens 5, 19) La grande prière d’Israël, elle même, évoquait la souffrance du Serviteur de Dieu. Cette méditation était scandée par les compositions poétiques et prophétiques qu’on appelle les psaumes, initiés par le roi David. Cette liturgie millénaire annonçait avec précision les détails de la vie du Messie et en particulier sa passion. Comme l’avaient annoncé les Psaumes les passants se moquèrent de Jésus sur la croix (Psaume 22,8; Psaume 44,14; Psaume 52,8), on a partagé ses vêtements (Psaume 22, 19); on a percé ses mains et ses pieds (Psaume 22, 17). Cette exactitude des prédictions a conduit a appeler le Psaume 22 le cinquième évangile. De même le Psaume 109 qui annonce les injures des passants, et les prophètes (Psaume 109,25; Jérémie 18,16; Job 16,4; Lamentations 2,15).

Un Evangile avant les Evangile
Cette précision des prédictions montre comment les évangélistes ont vu dans ces heures l’accomplissement de tout l’Ancien Testament. Le Christ lui-même a repris ces prophéties à son compte: “Jésus commença à faire connaître à ses disciples qu’il fallait qu’il allât à Jérusalem, qu’il souffrît beaucoup de la part des anciens, des principaux prêtres et des scribes, qu’il fût mis à mort, et qu’il ressuscitât le troisième jour.” (Matthieu 16, 21) En descendant du Thabor où il avait été transfiguré devant ses apôtres, Jésus leur avait ordonné: “Ne parlez à personne de cette vision, jusqu’à ce que le Fils de l’homme soit ressuscité des morts. Les disciples lui firent cette question: Pourquoi donc les scribes disent-ils qu’Elie doit venir premièrement? Il répondit: Il est vrai qu’Elie doit venir, et rétablir toutes choses. Mais je vous dis qu’Elie est déjà venu, qu’ils ne l’ont pas reconnu, et qu’ils l’ont traité comme ils ont voulu. De même le Fils de l’homme souffrira de leur part.” (Matthieu 17, 9-12) Se rappelant du serpent pendu à une croix qui guérissait les Hébreux au désert, Jésus précisa même: “Et moi, quand j’aurai été élevé de la terre, j’attirerai tous les hommes à moi.” (Jn 12,32) L’ampleur de l’événement ne peut se réduire au supplice des justes de cette terre. Il y a là un sommet de l’expérience humaine à cause de la parfaite innocence du Christ et de la façon dont il assume sa mort en annonçant sa propre victoire sur ces forces destructrices. Au larron qui agonise à côté de lui il annonce: “Ce soir même tu sera avec moi en Paradis.” En promettant le ciel à cet homme accusé de meurtre et de sédition, Jésus parle avec l’autorité de Dieu, le seul qui puisse pardonner. L’insistance des Ecritures sur la réalité de la mort du Christ lui donne une stature à part parmi tous ceux qui portent le nom de “Sauveur des Hommes”.

Hymne de Venance Fortunat, Vème siècle
“La croix bénie rayonne: sur elle, en sa chair, fut suspendu
Et de son propre sang lava nos plaies. Sur elle, devenu par amour notre douce victime,
Il arracha ses brebis à la gueule du loup. Agneau sacré,
Les mains percées, c’est là qu’il racheta le monde de sa perte
Et, par son propre trépas, barra le chemin à la mort.
Qui arracha Paul au péché, Pierre à la mort.
Arbre doux et noble, sois puissant par ta fécondité,
Puisque tes branches portent des fruits encore inconnus.
A ton parfum nouveau, les corps des défunts se lèvent.
Et reviennent à la vie ceux qui étaient privés du jour.
Sous le feuillage d’un tel arbre, la chaleur ne brûlera plus personne,
Ni la lune, la nuit, ni le soleil, le jour
Tu te dresses , tour brillante, sur les bords des cours d’eau,
Et tu déploies tes frondaisons émaillées de fraîches fleurs.
Entre tes bras s’enlace la Vigne, d’où coule pour nous
En abondance le doux vin qui a la rougeur du sang.”
Venance Fortunat, Poème 2,1.

 
Crucifixion, mosaïque

Eglise

[ Vandeuvres, Suisse ]
 


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  Documents associés : 
Lieu : 
La Chapelle de la Croix
St-Sépulcre
Texte de l'Evangile : 
Luc 23, 33-38
Matthieu 27, 32-37
Marc 15, 21-32
Jean 19, 17-21
Clés de Lecture : 
La Croix arbre de vie
Symboles : 
L’arbre de vie
La figuration de la croix
Expérience humaine : 
Echapper à la mort
Citations : 
Paul Ricoeur
Jérome, Ve siècle
Athanase, IVe siècle
Jean Chrysostome, Ve siècle
Hymne de Venance Fortunat, Vème siècle