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 Les saints
Quand nous disons que l’Eglise est sainte c’est parce que ses membres sont pardonnés à tout instant et non parce qu’ils seraient parfaits.
 

Citations :Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), appartient-il à l’homme d’agir pour une fin?
Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), la doctrine sacrée doit-elle user de métaphores?
Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), Dieu veut-il autre chose que lui-même?
Al-Fârâbi
Al-Ghazali
Al-Ghazali
Rabi’a al-Adawiyya
Ordonnance prévôtale
Ordonnance touchant les pauvres
Moine de Saint Alban
Ordonnance protégeant les commerçants
Les miracles de la Vierge
Charles Péguy


 
Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), appartient-il à l’homme d’agir pour une fin?
Somme théologique, I, II, q. i. a- 7., ad Il., 2, 3

“Tous les hommes, dit saint Augustin, se rencontrent dans le désir de la fin dernière, qui est le bonheur.”
Mais il y a deux façons de parler de la fin dernière: soit en fonction de sa nature de fin dernière, soit en fonction de ce en quoi elle est recherchée. Pour ce qui est de sa nature même, on peut dire que tous les hommes se rencontrent dans le désir de la fin dernière ; en effet chacun aspire à réaliser sa propre perfection, et telle est l’essence de la fin dernière. Mais les hommes ne sont plus d’accord lorsqu’il s’agit de ce en quoi consiste cette fin dernière. Les uns cherchent le bien suprême dans la richesse, les autres dans la volupté et d’autres encore dans n’importe quoi d’autre. Ainsi la douceur est agréable à tout palais, mais pour les uns est agréable surtout la douceur du vin, pour d’autres la douceur du miel ou de quelque autre chose de semblable. Or la saveur la plus agréable doit être celle qu’apprécie l’homme de meilleur goût. Pareillement le bien parfait doit être celui que recherche, comme fin dernière, l’homme chez qui l’élan de la volonté est convenablement orienté.
Si le pécheur se détourne de ce en quoi se trouve véritablement le bien parfait, il ne rétracte pas pour autant l’intention de la fin dernière, car il recherche vainement celle-ci en ce qu’elle n’est pas.
Les différents genres de vie s’expliquent par la diversité des choses que les hommes recherchent comme souverain bien.
Et si les actions sont individuelles, cependant le principe premier de l’agir est en chacune la nature dont le but est unique.
 


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Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), la doctrine sacrée doit-elle user de métaphores?
Tome premier, Question 1, article 9, p. 54-55, Somme théologique, éditions de la Revue des Jeunes, Desclée, Paris, 1925

CONCLUSION : Il convient certainement à l’Ecriture sacrée de nous livrer les choses divines et spirituelles sous le voile de similitudes empruntées aux choses corporelles. Dieu, en effet, pourvoit à tous les êtres en conformité avec leur nature. Or, il est naturel à l’homme de s’élever à l’intelligible par le sensible, parce que toute notre connaissance prend son origine des sens. Il est donc parfaitement convenable que dans l’Ecriture sainte, les choses spirituelles nous soient livrées au moyen de métaphores corporelles. C’est là ce que dit Denys dans la Hiérarchie céleste : “Le divin rayon ne peut luire pour nous que tamisé et diversifié par tous nos saints voiles.” De plus, l’Ecriture s’offrant à tous, selon ce mot de l’Epître aux Romains: “je me dois aux savants et aux ignorants”, il lui convient de proposer le spirituel sous la figure des choses corporelles, afin que par ce moyen tout au moins, les simples la comprennent, eux qui ne sont pas aptes à saisir en elIes-mêmes des doctrines abstraites.
 


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Thomas d’Aquin (XIIIe siècle), Dieu veut-il autre chose que lui-même?
Somme Théologique, 2a, qu.19, art.2

En sens contraire, l’Apôtre écrit (1 Th 4, 3): “Voici quelle est la volonté de Dieu: votre sanctification.”
Réponse: Il faut dire que Dieu veut non seulement lui-même, mais aussi d’autres choses. On le voit par la comparaison proposée précédemmentf (a.1). Un objet de nature n’a pas seulement une inclination naturelle à l’égard de son propre bien, pour l’acquérir lorsqu’il lui fait défaut ou pour s’y reposer lorsqu’il le tient, mais encore pour le communiquer à d’autres autant qu’il est possible. Aussi voyons-nous que tout agent, pour autant qu’il est en acte et achevé, produit son semblable 2. Donc la raison formelle de bonté comprend ceci: que chacun communique à d’autres le bien qu’il a, autant qu’il est possible. Et cela convient principalement à la volonté divine, d’où toute perfection provient selon quelque ressemblance. Ainsi donc, si les choses naturelles, dans la mesure où elles sont achevées, communiquent leur bonté à d’autres, bien plus encore appartient-il à la volonté divine de communiquer à d’autres son bien par manière de ressemblance, autant que c’est possible. Dieu veut donc et que lui-même et que les autres choses soient, lui-même étant la fin, les autres étant ordonnées à la fin, en tant qu’il appartient aussi à la bonté divine, par mode de convenance, d’être participée par d’autres.
 


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Al-Fârâbi
La città virtuosa, Biblioteca Universale Rizzoli, Milano, 1996, par Massimo Campanini, p.205

Ogni uomo ha per natura bisogno, per sussistere e per pervenire alla più eccellente perfezione, di molte cose, che non è possibile acquisisca tutte da solo. Ha quindi necessità di un [insieme di] persone ognuna delle quali lo sostenga per ciò di cui ha bisogno. Ciascuno, nei confronti di ogni altro, si trova in questo stato. Per cui non è possibile che l’uomo attinga quella perfezione, per la quale la natura lo ha predisposto, se non associandosi a una moltitudine di altri che collaborino con Lui, ognuno sovvenendo il suo simile con un qualcosa di cui quegli ha necessità per sopravvivere.’ Dunque, per il concorrere di ciò che tutta la comunità è in grado di offrire, ciascuno riceverà quanto gli è indispensabile per sopravvivere e per attingere la felicità. Perciò gli uomini si sono moltiplicati, si sono stanziati nelle regioni abitabili della terra e hanno costituito le umane società. Alcune di queste società sono Perfette, altre imperfette. Le perfette sono di tre specie: grandi, medie e piccole.
 


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Al-Ghazali
Le tabernacle des lumières (Michkât Al-Anwâr), Seuil, Paris, 1981. Traduction Roger Deladrière, p.60

Maintenant que tu as compris cela, sache que ceux qui sont dotés des visions intérieures ne voient aucune chose sans voir Dieu en même temps! L’un d’eux a même dit plus encore: “ Je ne vois aucune chose sans voir Dieu avant elle (1).” Les uns en effet voient les choses par Lui, les autres voient les choses d’abord et Le voient par les choses. C’est aux premiers que fait allusion Sa parole: “Eh quoi! ne suffit-il pas que ton Seigneur soit, pour chaque chose, témoin? ” Et ce sont les seconds que désigne celle-ci: “Nous leur ferons voir Nos signes aux horizons (2). ” Les premiers sont des hommes de contemplation (muchâhada), les seconds des hommes qui Le déduisent par des preuves (istidlâl). Les premiers sont au rang des justes, et les seconds au rang des “savants enracinés solidement ” dans la connaissance (3). A part ces deux catégories, il n’y a que celle des inconscients, qui sont “ voilés ”.
Notes:
1. Phrase prononcée par Abû Bakr. Omar aurait dit: “ Je ne vois aucune chose sans voir Dieu avec elle ”, et Uthmân: “ Je ne vois aucune chose sans voir Dieu après elle.” Pour les références, on pourra se reporter à notre Profession de foi d’Ibn Arabi, p. 55.
2. Coran, XLI, 53.
3. Expression coranique; sourate 111, verset 7, et sourate IV, verset 162.
 


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Al-Ghazali
Le tabernacle des Lumières (Michkât Al-Anwâr), Seuil, Paris, 1981. Traduction Roger Deladrière, p.63

Cet exposé symbolique viendra à l’appui du premier, en vertu de la tradition rapportée par Ibn Mas’ûd: “Sa lumière dans le cœur du croyant est comme celle d’un tabernacle “, ou, sous la forme transmise par Ubayy Ibn Ka’b: “La lumière du cœur de celui qui croit est comme celle d’un tabernacle(1).”
Note:
Selon le même symbolisme, une tradition plus courante compare le cœur à un “flambeau qui resplendit” de la lumière divine de la foi; cf. al-Muttaqî, Kanz al-Ummâl, t. I, p. 120, ou l’Ihyâ de Ghazâlî, t. 1, p. 109, et t. 111, p. 11 et p. 40 où Ghazâlî précise que “ ce cœur brille comme la lumière de la lampe hors du tabernacle de la Seigneurie ”.
 


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Rabi’a al-Adawiyya
dans Boubakeur cheikh si hamza, Traité moderne de théologie islamique, Maisonneuve & Larose, Paris, 1993, p.429-430

La soufia musulmane a-t-elle influencé profondément la mystique chrétienne? La chose est possible, mais reste à élucider. Dans son amour brûlant, Rabî’a affirmait que l’ascèse, l’amour calculé et la méditation sont insuffisants dans la véritable voie soufie, le désintéressement étant leur complément nécessaire. On lui doit, entre autres vers rapportés par al-Ghazâli dans son’Ihyâ et par Taha’Abd-l-Bânî Surûr dans l’étude qu’il lui a consacré, les suivants:
“Mes frères, ma quiétude est dans ma solitude; mon Amant y est toujours en ma présence. Je ne trouve rien qui puisse Le remplacer dans la passion qu’Il m’inspire. Partout où je me trouve je contemple Sa beauté. Il me sert d’oratoire et de direction quand je prie.”
Le mot mahabba (amitié, affection) lui semblait peu propre pour exprimer l’amour avec ses transports, l’alternance de ses joies et de ses souffrances, ses conflits intérieurs et ses fièvres. Elle lui substitua le mot hubb qui lui semblait mieux en rapport avec son objet véritable, en raison de la profondeur et du dynamisme de son acception. C’est ce qui ressort de ce quatrain : “Je T’aime de deux manières: d’un amour source de bonheur pour moi et d’un amour qui me porte à T’offrir tout ce dont Tu es digne;
L’amour de mon bonheur consiste à ne penser qu’à Toi, à l’exclusion de tout.
En l’amour de l’offrande qui Te convient est mon désir de voir tomber les voiles qui m’empêchent de Te voir.
Il n’y a en mes deux amours aucune gloire Sauf qu’en l’un comme en l’autre tout est Toi.”
Elle pose ainsi le problème de l’amour soufi: aimer pour jouir personnellement, c’est aimer imparfaitement; aimer Dieu pour Lui-même, en Sa gloire, c’est l’amour parfait.
Cette double perspective de l’amour se retrouve dans une autre dualité, celle des rétributions. Imitant un vieux proverbe populaire qui conseille de s’informer sur les voisins avant d’acheter une maison, elle s’écrie: “Al-Jâr, thumma-d-dâr” (le Voisin d’abord, ensuite la maison), c’est-à-dire pensons à Dieu d’abord avant de penser à la demeure après la mort. Et pour marquer son dédain ou son indifférence à l’égard de la “ demeure ”, c’est-à-dire de la rétribution en la vie future, elle ajoute dans son exaltation amoureuse:
“ Si je T’adore pour mériter Ton paradis, écarte m’en !
Si je T’aime par crainte de l’enfer, précipite-moi dedans!
Mas, si je T’adore pour Toi seul, ne me prive pas de la vision de Ton éternelle beauté.
Mon Bien-aimé, qu’aucun autre bien-aimé ne peut égaler,
Il n’y a, en mon cœur, aucune place pour tout autre que Lui.
Mon Bien-aimé échappe à mes yeux et à mon corps. Mais de mon cœur, il n’est jamais absent!”
On se pressait autour d’elle à Basra, pour suivre son enseignement, profiter de ses conseils et de sa sainteté. Parmi ses auditeurs on comptait des soufis de renom comme Mâlik b. Dinâr, Sufyan-th-Thawri (déjà mentionnés), etc. Ils ont les uns et les autres rapporté quelques-unes de ses formules les plus frappantes :
“ Dieu n’oublie pas le pauvre à cause de sa pauvreté et ne se souvient pas du riche à cause de sa richesse. ”
“Puisqu’Il connaît mon état, pourquoi aurais-je besoin de le Lui rappeler.”
“La reconnaissance, c’est la vision du Dispensateur, non l’offrande.”
“Le repentir? C’est à Dieu de mettre Son Serviteur en état de l’exprimer pour qu’Il l’agrée!”
“ Nul ne peut faire appel à Dieu dans la vie future, s’il ne L’a pas cherché en ce bas-monde. ”
S’élevant au-dessus du quiétisme et de l’ascèse, elle déclarait
“Je vais incendier le paradis et inonder l’enfer pour que ces deux voiles ne faussent pas la voie de ceux qui aspirent à la contemplation de leur Seigneur.”
Entre autres prières adressées à Dieu, on rapporte celle-ci
“Seigneur, les étoiles brillent alors que les yeux des humains sont fermés ! Les rois ont fermé les portes de leurs palais ; les amants sont l’un près de l’autre. Quant à moi je reste seul avec Toi.”
Elle mourut, comme on vient de le dire, en note, à Basra en 185/ 801, laissant le souvenir d’une âme assoiffée de Dieu, sans calcul, sans réticence, sans réserve. Elle sera le modèle même de la soufia musulmane par la pureté de son amour, la sincérité de sa ferveur, son renoncement à tout, sauf à Dieu.
 


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Ordonnance prévôtale
Ordonnance prévôtale. Paris 1385.

L’ordonnance prévôtale de Paris fait place aux contestations entre le maître et ses ouvriers. C’est donc sans naïveté qu’on les représentera dans les vitraux, sachant que par delà leurs défauts, ils sont objet de la bienveillance divine qui les illumine.
“Plusieurs gens de métiers, tisserands de linge, foulons, maçons, charpentiers... veulent se rendre au travail comme bon leur semble... et ils demandent à être payés de leur journée comme s’ils l’avaient faite tout uniment...; nous avons ordonné que toutes sortes de ces gens... aillent au travail du soleil levant au soleil couchant.“
 


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Ordonnance touchant les pauvres
Documents relatifs à l’histoire de l’industrie. Paris 1319. Cité par Fagniez. Paris 1900 Tome 2, p.40, n° 19.

C’est dans leur foi chrétienne que les citadins trouvent l’obligation de secourir l’ouvrier malade pour honorer sa dignité d’homme racheté par Jésus Christ. Cette estime réciproque a été remplacée par la sécurité sociale quand il n’a plus été question de la foi, mais seulement de préserver la paix civile.
“Comme les ouvriers fourreurs nous ont supplié que, comme ils tombent souvent en de graves maladies du fait du grand travail de leur métier, il leur faut alors mendier... Il a été décidé que chaque ouvrier fourreur tant qu’il sera malade ou impotent recevra cent onze sous chaque semaine... ceux qui voudront faire partie de cette “aumône” paieront dix sous d’entrée.”
 


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Moine de Saint Alban
Sermon anglais de 1381. Dans “Chronicon Angliae a monacho Sancti Albani”, ed. Thompson 1874.

S’étonnant des privilèges des aristocrates qui étaient toujours solidaires, un prédicateur peut remarquer :
“Quand Adam bêchait et qu’Eve filait, qui était alors gentilhomme? A l’origine tous étaient égaux; la servitude ne fut introduite que par des actions injustes, contraires à la volonté divine ...”
 


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Ordonnance protégeant les commerçants
Documents inédits concernant les marchands protégés par la législation locale Paris 1380

Pendant les grands voyages des commerçants qui alimentent les foires d’Europe, on prend soin de façon familiale non seulement du marchand, mais de tout ce qui le touche.
“Premièrement nous mettons les susdits (épiciers, merciers, apothicaires) en notre sauve et spéciale garde avec leurs biens, compagnons, serviteurs,... item qu’ils soient francs et quittes de toutes impositions, subsides, aides d’ost...; qu’ils ne paient aucun travers, péages...”
 


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Les miracles de la Vierge
“Les miracles de Vierge” rapportent des récits de conversion miraculeuse, telle que celles du “Chevalier au barillet” et de “La nonnain qui partit avec un chevalier” qui témoignent d’une espérance foncière dans l’indulgence de Dieu dès que le pécheur reconnaît sa faute.
 


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Charles Péguy
Prière de résidence

… Voici le lourd pilier et la montante voûte;
Et l’oubli pour l’hier, et l’oubli pour demain;
Et l’inutilité de tout calcul humain;
Et plus que le péché, la sagesse en déroute.
Voici le lieu du monde où tout devient facile,
Le regret, le départ, même l’événement,
Et l’adieu temporaire et le détournement,
Le seul coin de la terre où tout devient docile,
… Voici le lieu du monde où tout est revenu
Après tant de départs, après tant d’arrivées.
Voici le lieu du monde où tout est pauvre et nu
Après tant de hasards, après tant de corvées.

Voici le lieu du monde où tout rentre et se tait,
Et le silence et l’ombre et la charnelle absence,
Et le commencement d’éternelle présence
Le seul réduit où l’âme est tout ce qu’elle était.
 


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  Documents associés : 
Lieu : 
Cathédrale de Chartres
Description de l’image : 
Les vitraux de la nef de la cathédrale de Chartres
Histoire : 
La transformation du regard de l’Eglise sur le travail
Présupposés théologiques : 
La sainteté est donnée par Dieu
Symboles : 
Le jeu de la lumière dans les vitraux